L’Union du Maghreb Arabe : un
projet d’intégration contrarié.
Une ambition populaire, une quête des partis politiques, à
l’aube de l’indépendance du Maroc et de la Tunisie, la conférence de Tanger se
tient le 27 avril 1958, mise à rude épreuve par l’interception de
l’avion qui devait conduire les
dirigeants du FLNA à la conférence par
les autorités françaises et leur incarcération.
Présenté en tant que jalon régional dans la construction de
l’unité arabe, projet au centre des aspirations populaires mais critiqué par les
nationalistes extrémistes, pour lesquels, il n’est d’indépendance que celle de
l’ensemble de la région.
Une union sacro-sainte de l’Atlantique au Golfe Persique, fut
le rêve et le centre d’une mobilisation, pour
la réalisation des aspirations à une prise de contrôle par la nation
arabe de son destin, de retrouver sa dignité, après l’affront de l’occupation
de la Palestine et de l’asservissement de son peuple et son avilissement, le
réduisant au statut de réfugiés disséminés, dans des camps de fortune entre les
pays de la région.
Au cœur de l’action pour la libération de la Tunisie, une
querelle fratricide fut enclenchée, opposant la vision d’une stratégie des étapes,
qui devait sceller une démarche, à celle du tout ou rien des tenants du
nationalisme arabe, idée dominante à l'époque, pour lesquels cette démarche constituerait une trahison de
la cause pour l’indépendance algérienne.
Clivage stratégique qui devait être quasi fatal au mouvement
de libération, détournant la lutte, d’une mobilisation pour l’indépendance à
une guerre d’idéologies et de leadership.
La raison ayant prévalu à la passion nationaliste, d’autant
que les résultats ont conforté la démarche par étapes aux vues stériles
globalistes.
L’indépendance de la Tunisie, ainsi que celle du Maroc ont été d’un
grand apport pour le soutien de l’indépendance algérienne, lui offrant un point
d’appui et une base arrière pour une
mobilisation de combat contre l’occupant, dans lequel la Tunisie a payé le lourd tribus
du sang à Sakiet Sidi Youssef, puis pour la libération de Bizerte des forces d'occupation.
Poursuivant sa démarche pragmatique positive pour la
construction maghrébine, et mettant à profit le recouvrement des pays maghrébins de leur
indépendance, la Tunisie s’est faite forte de contribuer à la relance de la construction de
l’espace nord africain en abritant le CPCM( Comité Permanent Consultatif
Maghrébin) dont le Secrétariat Général fut assumé par un militant de la cause
de l’Union du Maghreb Mustapha Filali.
Plusieurs institutions ont été mises en place par cette
instance: dont celle à Tanger pour les Etudes Industrielles Maghrébines, (Centre des Etudes Industrielles du Maghreb), les
instances réunissant les Directeurs Généraux des douanes des pays membres, les
PDG de Sociétés d’électricité, les PDG des chemins de fer, les gouverneurs des
banques centrales maghrébines….
Des projets industriels maghrébins ont été lancés, devant
faciliter l’intégration économique aux frontières communes, ainsi des usines de
ciment blanc, de verre plat, de tracteurs, de moteurs diesels, au capital mixte
ont été créées au nord ouest tunisien, soutenus par une clause leur donnant la priorité
d’approvisionnement du marché maghrébin, dans la limite de 10% de coût
supérieur à celui du marché mondial, cette clause n’a pas été suivie de mise en œuvre
mettant ces industries naissantes à rude épreuve et aboutissant à leur liquidation
progressive, d’autant que l’Algérie avait lancé des projets concurrentiels sur
son territoire arguant de la dimension de son marché et de la sécurisation de son approvisionnement.
Les instances de concertation sectorielles dans les domaines de
l’électricité, de la douane, du transport ferroviaire, des banques centrales
ont survécu à la dissolution du CPCM et par la suite à l’entrée de l’UMA en
hibernation.
Les rivalités entre le Maroc et l’Algérie inhérentes à la
décolonisation par l’Espagne du Sahara Occidental et du Statut de son territoire
fut le point de départ pour l’avortement du CPCM(1975) puis pour remettre en
question la construction de l’UMA.
Le 17 février 1989 a vu la naissance à Marrakech de l’UMA
entre les cinq pays de cet espace : la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la
Tunisie et la Libye, une construction basée sur le principe de taire les
divergences et d’aller de l’avant pour
les projets rencontrant l’adhésion de toutes les parties.
Un Secrétariat Général est créé abrité par le Maroc et dont
la fonction est assumée par l’un de nos nationaux, tenant compte de notre
engagement sincère pour la construction de cet ensemble et écartant les
rivalités de puissance et d’influence entre l’Algérie et le Maroc, centre de
poids autour duquel gravite ce projet.
Un parlement à Alger (Conseil Consultatif,Choura), une Commission
Judiciaire à Nouackchott, , une Université et une Académie
Maghrébine, à Tripoli, et une banque maghrébine d'investissement et de commerce extérieur que devait abriter la Tunisie, sont les principaux organes prévus par les actes constitutifs de l'union.
Toutes les instances de l’Union ont été mises en œuvre, à l’exception
de la Banque que devait abriter la Tunisie.
Tous les Actes Constitutifs de l’Union et de ses organes,
signés à Marrakech, lors du premier sommet de l’UMA et ratifiés par les pays
membres, n’ont jamais été ratifiés par le Maroc, qui en garde les
originaux dans ses coffres, mettant tout l’édifice, en marge de la conformité
juridique lui donnant une force exécutoire.
Il en est de même des trente cinq accords passés, tout au long
des six sommets de l’Union signés mais non ratifiés par le Maroc, ainsi que de ceux qui attendent leur signature lors du septième sommet.
Le seul organe décisionnel de l’UMA se trouve le Conseil de
la présidence, dont le dernier en date à se réunir fut tenu à Tunis couronnant
la présidence tournante de l’UMA par la Tunisie 2-3 Avril 1994.
Le septième sommet ne s’est depuis jamais réuni, le Maroc
mettant un préalable à tout projet commun, l’abandon par l’Algérie de son
soutien au Polisario, dont il tient sur son territoire un camp de réfugiés et n’a
eu de cesse de porter la question devant le Conseil de Sécurité des Nations
Unies, au Comité pour la décolonisation.
Les frontières entre le Maroc et l’Algérie sont fermées,
depuis, outre le gel des activités de l’UMA, ballotée entre une présidence
provisoire par l’Algérie, vu le désistement
de la Libye à assumer sa présidence tournante après la Tunisie, en raison d’un long embargo mettant
ce pays dans l’incapacité de conduire l’ensemble régional.
A la levée de l’embargo la Libye a repris la direction de l’UMA
avec des projets illusoires d’en assurer
la remise en marche, par une direction effective par Kadhafi des forces armées
des pays la constituant.
L’avènement du printemps arabe remet à l’ordre du jour le
projet maghrébin.
Une euphorie a cependant caractérisé les propositions
généreuses et irréelles tunisiennes allant de l’idée de la fusion
tuniso-libyenne, l'appel lancé à l'Egypte d'intégrer l'Union, de la mise en application des cinq libertés en faveur des
citoyens maghrébins, dont l’ouverture des frontières et de leur passage sur
simple présentation de la carte d’identité, proposition rejetée par toutes les parties
concernées.
Une erreur fatale devait entacher l’initiative d’appeler à la
tenue d’un sommet annoncé lors de la tournée de Marzouki, en Mauritanie et au
Maroc, au dam de la direction algérienne qui ne voulait l’entendre de cette
oreille.
Sommet qualifié par l’un de ses initiateurs, à savoir le MAE
marocain, de sommet de pure forme, il en diminue l’apport, la signification, et
la portée à la pré condition de l’ouverture des frontières entre l’Algérie et
le Maroc, question que renvoie l'Algérie au plan strictement de négociation bilatéral, entre les deux pays.
Au préalable de l’expression de la bonne foi et l’abandon par l’Algérie de sa position sur le Sahara Occidental, considéré territoire national marocain, l'Algérie rétorque qu'elle s'en remet à la légalité internationale et le plan de l'ONU, sur cette question.
Au préalable de l’expression de la bonne foi et l’abandon par l’Algérie de sa position sur le Sahara Occidental, considéré territoire national marocain, l'Algérie rétorque qu'elle s'en remet à la légalité internationale et le plan de l'ONU, sur cette question.
Perçue en tant que manœuvre électoraliste, d’une instance qui
manque de prérogatives et de compétences de pouvoir, la proposition de tenir le
sommet maghrébin est autant irréelle qu’irréaliste, elle n’avancerait à rien le
processus de réanimation de l’UMA, sinon de mettre à nu les divergences et les dissensions et de conforter les ego de ses initiateurs.
A l’utopie et l’ouverture de cœur d’un nationalisme suranné,
sanctionné par les faits d’histoire de notre pays, et les dissensions entre les pays arabes, au rêve d’une restauration
du Khalifat, et la réduction des citoyens au statut de sujets et la négation du
processus démocratique, la Tunisie semble se placer en marge de l’histoire,
départie de ses principes, de ses constantes de raison, de modération d’ouverture
et d’engagement civilisationnel universel, pour des théories de compromission
de son indépendance, d’antagonisme social de division ( التدافع الإجتماعي)
Une fuite en avant sur les plans régional et international
caractérisée par la légèreté dans la prise de certaines décisions, dont la
rupture avec la Syrie et l’affaire de la remise de l’ancien premier ministre
Libyen aux autorités de transition, dans ce pays, les jugements "hâtifs" à posteriori, de la politique suivie par l'Algérie, face au phénomène fondamentaliste, portant préjudice à notre
image de marque et notre audience maghrébine et internationale, la Tunisie ne cesse de
récolter les contre performances de son dérapage au virage de sa transition.
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