lundi 24 septembre 2012

L'Union du Maghreb Arabe: un projet d'intégration maghrébine contrarié.

L’Union du Maghreb Arabe : un projet d’intégration contrarié.

Une ambition populaire, une quête des partis politiques, à l’aube de l’indépendance du Maroc et de la Tunisie, la conférence de Tanger  se  tient le 27 avril 1958, mise à rude épreuve par l’interception de l’avion qui devait  conduire les dirigeants du FLNA  à la conférence par les autorités françaises et leur incarcération.
Présenté en tant que jalon régional dans la construction de l’unité arabe, projet au centre des aspirations populaires mais critiqué par les nationalistes extrémistes, pour lesquels, il n’est d’indépendance que celle de l’ensemble de la région.
Une union sacro-sainte de l’Atlantique au Golfe Persique, fut le rêve et le centre d’une mobilisation, pour  la réalisation des aspirations à une prise de contrôle par la nation arabe de son destin, de retrouver sa dignité, après l’affront de l’occupation de la Palestine et de l’asservissement de son peuple et son avilissement, le réduisant au statut de réfugiés disséminés, dans des camps de fortune entre les pays de la région.
Au cœur de l’action pour la libération de la Tunisie, une querelle fratricide fut enclenchée, opposant la vision d’une stratégie des étapes, qui devait sceller une démarche, à celle du tout ou rien des tenants du nationalisme arabe, idée dominante à l'époque, pour lesquels cette démarche constituerait une trahison de la cause pour l’indépendance algérienne.
Clivage stratégique qui devait être quasi fatal au mouvement de libération, détournant la lutte, d’une mobilisation pour l’indépendance à une guerre d’idéologies et de leadership.
La raison ayant prévalu à la passion nationaliste, d’autant que les résultats ont conforté la démarche par étapes aux vues stériles globalistes.
L’indépendance de la Tunisie, ainsi que celle du Maroc ont été d’un grand apport pour le soutien de l’indépendance algérienne, lui offrant un point d’appui et une base arrière pour  une mobilisation de combat contre l’occupant, dans lequel la Tunisie a payé le lourd tribus du sang à Sakiet Sidi Youssef, puis pour la libération de Bizerte des forces d'occupation.
Poursuivant sa démarche pragmatique positive pour la construction maghrébine, et mettant à profit le recouvrement des pays maghrébins de leur indépendance, la Tunisie s’est faite forte de contribuer à la relance de la construction de l’espace nord africain en abritant le CPCM( Comité Permanent Consultatif Maghrébin) dont le Secrétariat Général fut assumé par un militant de la cause de l’Union du Maghreb Mustapha Filali.
Plusieurs institutions ont été mises en place par cette instance: dont celle à Tanger pour les Etudes Industrielles Maghrébines, (Centre des Etudes Industrielles du Maghreb), les instances réunissant les Directeurs Généraux des douanes des pays membres, les PDG de Sociétés d’électricité, les PDG des chemins de fer, les gouverneurs des banques centrales maghrébines….
Des projets industriels maghrébins ont été lancés, devant faciliter l’intégration économique aux frontières communes, ainsi des usines de ciment blanc, de verre plat, de tracteurs, de moteurs diesels, au capital mixte ont été créées au nord ouest tunisien, soutenus par une clause leur donnant la priorité d’approvisionnement du marché maghrébin, dans la limite de 10% de coût supérieur à celui du marché mondial, cette clause n’a pas été suivie de mise en œuvre mettant ces industries naissantes à rude épreuve et aboutissant à leur liquidation progressive, d’autant que l’Algérie avait lancé des projets concurrentiels sur son territoire arguant de la dimension de son marché et de la sécurisation de  son approvisionnement.
Les instances de concertation sectorielles dans les domaines de l’électricité, de la douane, du transport ferroviaire, des banques centrales ont survécu à la dissolution du CPCM et par la suite à l’entrée de l’UMA en hibernation.
Les rivalités entre le Maroc et l’Algérie inhérentes à la décolonisation par l’Espagne du Sahara Occidental et du Statut de son territoire fut le point de départ pour l’avortement du CPCM(1975) puis pour remettre en question la construction de l’UMA.
Le 17 février 1989 a vu la naissance à Marrakech de l’UMA entre les cinq pays de cet espace : la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et la Libye, une construction basée sur le principe de taire les divergences et  d’aller de l’avant pour les projets rencontrant l’adhésion de toutes les parties.
Un Secrétariat Général est créé abrité par le Maroc et dont la fonction est assumée par l’un de nos nationaux, tenant compte de notre engagement sincère pour la construction de cet ensemble et écartant les rivalités de puissance et d’influence entre l’Algérie et le Maroc, centre de poids autour duquel gravite ce projet.
Un parlement à Alger (Conseil  Consultatif,Choura),  une Commission Judiciaire à Nouackchott,  , une Université et une Académie Maghrébine, à Tripoli, et une banque maghrébine d'investissement et de commerce extérieur que devait abriter la Tunisie, sont les principaux organes prévus par les actes constitutifs de l'union.
Toutes les instances de l’Union ont été mises en œuvre, à l’exception de la Banque que devait abriter la Tunisie.
Tous les Actes Constitutifs de l’Union et de ses organes, signés à Marrakech, lors du premier sommet de l’UMA et ratifiés par les pays membres, n’ont jamais été ratifiés par le Maroc, qui en garde les originaux dans ses coffres, mettant tout l’édifice, en marge de la conformité juridique lui donnant une force exécutoire.
Il en est de même des trente cinq accords passés, tout au long des six sommets de l’Union signés mais non ratifiés par le Maroc, ainsi que de ceux qui attendent leur signature lors du septième sommet.
Le seul organe décisionnel de l’UMA se trouve le Conseil de la présidence, dont le dernier en date à se réunir fut tenu à Tunis couronnant la présidence tournante de l’UMA par la Tunisie 2-3 Avril 1994.
Le septième sommet ne s’est depuis jamais réuni, le Maroc mettant un préalable à tout projet commun, l’abandon par l’Algérie de son soutien au Polisario, dont il tient sur son territoire un camp de réfugiés et n’a eu de cesse de porter la question devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies, au Comité pour la décolonisation.
Les frontières entre le Maroc et l’Algérie sont fermées, depuis, outre le gel des activités de l’UMA, ballotée entre une présidence provisoire par l’Algérie, vu le désistement  de la Libye à assumer sa présidence tournante après la Tunisie, en raison d’un long embargo mettant ce pays dans l’incapacité de conduire l’ensemble régional.
A la levée de l’embargo la Libye a repris la direction de l’UMA avec des projets illusoires  d’en assurer la remise en marche, par une direction effective par Kadhafi des forces armées des pays la constituant.
L’avènement du printemps arabe remet à l’ordre du jour le projet maghrébin.
Une euphorie a cependant caractérisé les propositions généreuses et irréelles tunisiennes allant de l’idée de la fusion tuniso-libyenne, l'appel lancé à l'Egypte d'intégrer l'Union, de la mise en application des cinq libertés en faveur des citoyens maghrébins, dont l’ouverture des frontières et de leur passage sur simple présentation de la carte d’identité,  proposition rejetée par toutes les parties concernées.
Une erreur fatale devait entacher l’initiative d’appeler à la tenue d’un sommet annoncé lors de la tournée de Marzouki, en Mauritanie et au Maroc, au dam de la direction algérienne qui ne voulait l’entendre de cette oreille.
Sommet qualifié par l’un de ses initiateurs, à savoir le MAE marocain, de sommet de pure forme, il en diminue l’apport, la signification, et la portée à la pré condition de l’ouverture des frontières entre l’Algérie et le Maroc, question que renvoie l'Algérie au plan strictement de négociation bilatéral, entre les deux pays.
 Au préalable de l’expression de la bonne foi et l’abandon par l’Algérie de sa position sur le Sahara Occidental, considéré territoire national marocain, l'Algérie rétorque qu'elle s'en remet à la légalité internationale et le plan de l'ONU, sur cette question.
Perçue en tant que manœuvre électoraliste, d’une instance qui manque de prérogatives et de compétences de pouvoir, la proposition de tenir le sommet maghrébin est autant irréelle qu’irréaliste, elle n’avancerait à rien le processus de réanimation de l’UMA, sinon de mettre à nu les divergences et les dissensions et de conforter les ego de ses initiateurs.
A l’utopie et l’ouverture de cœur d’un nationalisme suranné, sanctionné par les faits d’histoire de notre pays, et les dissensions entre les pays arabes,  au rêve d’une restauration du Khalifat, et la réduction des citoyens au statut de sujets et la négation du processus démocratique, la Tunisie semble se placer en marge de l’histoire, départie de ses principes, de ses constantes de raison, de modération d’ouverture et d’engagement civilisationnel universel, pour des théories de compromission de son indépendance, d’antagonisme social de division (   التدافع الإجتماعي)
Une fuite en avant sur les plans régional et international caractérisée par la légèreté dans la prise de certaines décisions, dont la rupture avec la Syrie et l’affaire de la remise de l’ancien premier ministre Libyen aux autorités de transition, dans ce pays, les jugements "hâtifs" à posteriori,  de la politique suivie par l'Algérie, face au phénomène fondamentaliste,  portant préjudice à notre image de marque et notre audience maghrébine et internationale, la Tunisie ne cesse de récolter les contre performances de son dérapage au virage de sa transition.